« Les auteurs d’infraction internés et la libération à l’essai : en-quête d’autonomie » (titre provisoire)
Ce projet de recherche doctorale mené par Sophie De Spiegeleir, sous la promotion de Yves Cartuyvels et Nicolas Marquis, et qui s’inscrit dans le cadre du projet interdisciplinaire AutonomiCap, porte sur la scène de l’internement des auteurs d’infraction reconnus atteints d’un trouble mental qui échappent donc au système pénal en raison de leur irresponsabilité. Plus particulièrement, ce projet s’intéresse au stade de la libération à l’essai des individus internés en Belgique francophone tel que régi par la loi du 5 mai 2014 (et entrée en vigueur le 1er octobre 2016).
Cette recherche se décline en deux volets : dans un premier temps, il s’agira, d’une part, de mieux saisir comment les professionnel-le-s intervenant au stade de la libération à l’essai s’approprient les catégories d’autonomie et de handicap et les mettent en œuvre. Le « dispositif responsabilisant » qu’est la libération à l’essai fait appel aux « capacités d’autonomisation » de l’individu interné (Cartuyvels in Cantelli et Génard, 2007) qui doit prouver qu’il est capable de mener à bien son projet de réinsertion en vue d’une libération définitive. Ce champ semble être en effet traversé par une attente en termes d’autonomie des individus sous mesure judiciaire, alors étiquetés comme « troublés » et « à risque ». Le trouble mental doit suffisamment être stabilisé et le risque de commettre de nouvelles infractions doit être considérablement réduit, ce qui implique de mobiliser des outils de commensuration de l’autonomie, du « trouble » et du risque. Dans un second temps, il s’agira d’analyser les implications de ces pratiques sur l’expérience vécue des personnes internées en libération à l’essai.
Pour éclairer ces deux volets de la recherche, une enquête ethnographique de plusieurs mois sera menée au sein des lieux où se déroule la libération à l’essai ainsi qu’auprès des individus directement concernés (les interné-e-s). Si beaucoup de travaux se sont déjà penchés sur l’internement pénal et ses enjeux, peu se sont intéressés à l’étape de la « sortie » de l’internement et aux questions de savoir, d’une part, comment les professionnel-le-s évaluent concrètement la « capacité » des individus à sortir de la mesure et à se réinsérer, et d’autre part, comment ces derniers en ont fait l’expérience. En outre, cette recherche vise également à analyser comment, à un niveau plus macro, « la montée en puissance des références à l’autonomie dans le champ du handicap remodèle les objectifs et les modalités de l’action publique » (projet ARC, p. 3), en s’articulant aux projets de thèse de Louis Triaille et Noé Rimbourg.